Rôle du médecin scolaire. 38ème colloque médical du SNAMSPEN/Sgen-CFDT, syndicat des médecins de l’éducation nationale.
un succès, plus de 160 participants venus de toute la France
Le 38ème colloque médical du SNAMSPEN, syndicat national des médecins de santé publique de l’éducation nationale, sur « Les violences faites aux enfants, Prévenir, dépister, et agir, rôle du médecin scolaire » (le programme), les 16 et 17 novembre 2017, a rassemblé à Paris plus de 160 professionnels venus de toutes la France. Médecins scolaires, mais également médecins des municipalités, des conseils départementaux et de PMI se sont retrouvés autour de ce qui fait le cœur de leur métier, la prévention et la promotion de la santé en faveurs des élèves, enfants d’abord. Monsieur Moraillon, président de la Ligue française des droits de l’enfant, était présent et attentif aux débats. L’enjeu de cette formation médicale a été explicité par la Secrétaire générale du SNAMSPEN/Sgen-CFDT, Patricia Colson, qui a rappelé, dans son ouverture de colloque, la priorité nationale concernant la lutte contre les violences faites aux enfants.
Le thème du colloque s’est trouvé porté par les actualités, et l’intérêt des médias (journalistes de Zone interdite, d’Envoyé spécial et de la NHK, chaine publique japonaise) présents pour l’évènement en est la preuve.
des intervenants de qualité
Des intervenants de qualité, à l’expertise reconnue, se sont succédé sur ces deux jours de formation.
Le Docteur Hélène Romano a traité des nouvelles violences faites aux enfants dans une société en pleine mutation, qui oublie leurs besoins. Immédiateté, communication non contrôlée, exigences inappropriées, privation parentale, autant de violences psychologiques difficiles à mettre en évidence…
Le Docteur Muriel Salmona a passionné l’assemblée en traitant des mécanismes de la mémoire traumatique (les actes : première partie – seconde partie – troisième partie). Psychiatre, présidente de l’association Mémoire traumatique, elle a souligné l’importance de prévenir chez les enfants les violences, de les dépister suffisamment tôt pour éviter la constitution de traumatismes lourds de conséquences sur la santé psychique et organique de l’individu à l’âge adulte. Les mécanismes de défense cérébrale pour supporter, ignorer les violences subies nous ont été explicités. Ces événements trop traumatisants restent enfouis, par un mécanisme de protection, dans la mémoire traumatique, non accessibles à notre conscience, et sont responsables de désordre psychique et organique. Ils nécessitent une prise en charge adaptée passant par des thérapies spécialisées.
Le Docteur Céline Raphael a fait un témoignage poignant sur son histoire personnelle de violence familiale débutée à 4 ans et allant crescendo… Il aura fallu attendre l’entrée au lycée pour qu’une infirmière scolaire et un médecin scolaire s’interrogent et agissent sur le cas de cette adolescente, amaigrie, triste, faisant plus de 40 heures de piano dans la semaine alors qu’elle n’aimait pas cela…. Le rôle de la santé scolaire, infirmière et médecin, apparait primordial dans la prévention de la maltraitance faite aux enfants. On a pu constater à quel point ces enfants maltraités par leur famille échappaient à la vigilance du médecin de famille. Céline Raphael a participé aux réflexions concernant le plan interministériel de prévention contre les violences faites aux enfants et a relaté son histoire dans le livre La démesure.
Le Docteur Leila Lazaro, pédiatre, a exposé le syndrome de Münchhausen par procuration. Responsable du service des urgences de l‘hôpital de la Côte basque, elle a démontré les difficultés de mise en œuvre de la protection des enfants subissant cette forme de maltraitance de la part de leur famille. Cette maltraitance est bien souvent générée par la mère et induit des pathologies chez l’enfant, parfois d’issue fatale. La mise en place de référents hospitaliers pour la violence faite aux enfants permettra peut-être une vigilance accrue pour ce syndrome difficile à mettre en évidence. Il faut souvent faire une véritable enquête sur le nomadisme des prises en charge de l’enfant victime, qui doit alerter.
Le Docteur Christine Cordiolani a rappelé les missions des médecins de l’Éducation nationale quant à la protection de l’enfance. Médecin de l’éducation nationale, conseiller technique du recteur de Versailles, notre consœur a mis en évidence les aspects juridiques de ces missions. La protection de l’enfance est de la responsabilité de tous les acteurs de l’école. Le constat de lésions ou de retentissement psychique et l’élaboration de certificat est une responsabilité importante du médecin de l’Éducation nationale. Il n’y a pas de poursuite juridique recensée par le Conseil National de l’Ordre des Médecins (CNOM) en direction des médecins de l’éducation nationale dans le cadre de cette activité. Il semble au contraire que les poursuites juridiques à l’encontre des médecins, en général, soient du fait d’un défaut de signalement des violences faites aux enfants. Acteurs au sein de la communauté éducative, la concertation avec les membres de l’équipe éducative est nécessaire, mais le médecin reste libre de signaler toute situation qu’il juge critique pour un enfant, alors même qu’une évaluation de la situation est en cours.
Le Docteur Ghada-Hatem, gynécologue-obstétricienne, ayant créé la Maison des Femmes en Seine Saint Denis, a elle aussi passionné l’auditoire en exposant le contexte, l’histoire des mutilations sexuelles encore persistantes dans certains pays. Elle nous a exposé son travail et celui de son équipe pour la prévention de ces mutilations, la prise en charge de celles-ci, la reconstruction physique et psychique de ces femmes mutilées. Elle nous a donné les éléments permettant de repérer les enfants à risque de mutilations et les clés d’une prévention portée par les familles elles-mêmes, quand elles sont conscientes de l’impact des mutilations.
Madame Nadège Séverac, sociologue, chercheuse, a permis par ses travaux la prise en compte des violences conjugales dans le plan de lutte interministériel contre les violences faites aux enfants. Les violences conjugales ont des répercussions psychiques mais également organiques chez les enfants. Ces violences, insuffisamment prises en compte auparavant, sont désormais repérées comme une véritable violence faite aux enfants. Plus de 80% des femmes violentées appelant le 3919 ont des enfants.
Le Professeur Irène François, médecin légiste et psychiatre, en charge de la Cellule d’Urgence Médico-Psychologique (CUMP) de Dijon, nous a exposé les règles de rédaction des certificats pour constat de violences physiques. Elle a traité de la difficulté à rédiger un certificat médical pour les violences psychiques. L’apport de son exposé pour la pratique quotidienne a été considéré comme essentiel par les médecins ayant assisté au colloque.
Le colloque s’est terminé par l’exposé fait par Madame Miclon-Hautbois, responsable de la section de protection de l’enfance au ministère de la santé, du plan de lutte interministériel contre les violences faites aux enfants. La France apparaît en retard dans la prise en compte des violences faites aux enfants. Ce plan est une première réponse en direction d’une meilleure prise en compte de ces violences et les prochains résultats des travaux engagés permettront de consolider les nouvelles orientations prises dans ce domaine.
Catherine Nave-Bekhti, secrétaire générale du Sgen-CFDT, invitée au colloque, a finalement salué la qualité de l’événement et l’honneur d’accueillir dans l’auditorium de la CFDT cette formation médicale qui a rassemblé autant de professionnels. Elle a souligné l’importance donnée par cet événement à la protection des élèves, protection portée par tous les professionnels de l’éducation nationale.