La loi de transformation de la fonction publique, promulguée le 6 aout 2019 va modifier la gestion des personnels au service de la fonction publique.
En ce qui concerne les médecins de l’éducation nationale, les représentants des personnels élus en CAPN n’auront plus de rôle ni dans les promotions (à partir de 2021), ni dans les mutations (dès 2020), si ce n’est dans les situations litigieuses et seulement lorsque les agents feront appel d’une décision.
La loi prévoit que l’administration édite des lignes directrices de gestion (LDG) qui doivent impérativement concerner tous les corps d’un même champ professionnel. Pour les médecins se seront les LDG des personnels BIATSS. Ces lignes seront éditées au niveau national pour une durée de 5 ans et permettront à l’administration de prendre des décisions pour les actes de gestion concernant les personnels.
Ces lignes directrices de gestion sont en cours de discussion au ministère avec les organisations syndicales. Nous avons déjà fait remarquer l’absence de critères définis quant à mesurer objectivement la façon de servir et la valeur professionnelle, alors que d’autres corps disposent de barèmes clairs pour établir le tableau d’avancement annuel des promotions. Le SNAMSPEN/Sgen-CFDT craint qu’en l’absence de médecin conseiller technique départemental, à même d’évaluer la qualité du travail et l’adaptation particulière à l’environnement scolaire, les promotions ne soient basées que sur la seule notion d’âge et d’ancienneté, sans reconnaissance du dynamisme et des expertises particulières de certains médecins. La notion d’équité et de justice exige la définition claire et transparente d’un barème, que cela soit pour les promotions en première classe (prévue systématiquement dans le déroulement d’une carrière complète) ou pour le grade en hors classe (prévu en raison d’une valeur professionnelle particulière)
L’ancienneté et l’âge sont censés n’intervenir que pour départager des valeurs professionnelles jugées identiques. Pourtant aucun barème clair et précis ne permet d’évaluer et de classer les professionnels de façon objective. Une hiérarchie méconnaissant notre exercice a tendance à privilégier les critères liés à l’âge, et à l’acceptation résignée d’un exercice rendu de plus en plus difficile par la pénurie.
Quant à laisser croire que les agents, particulièrement dévoués et respectueux de la hiérarchie, vont oser faire appel pour une promotion non obtenue, c’est bien mal connaître la docilité et la crainte de nos collègues face à l’administration. Et puis, comment penser que l’on peut se voir promu·e un jour si on manifeste son mécontentement ?
Le rôle des organisations syndicales et des commissaires paritaires nationaux sont donc appelés à se modifier. Le rôle des délégués académiques du SNAMSPEN/Sgen-CFDT devrait être renforcé pour assurer au plus proche des secteurs un réseau d’information et d’accompagnement des agents sur leurs droits.
L’entretien professionnel, un moment privilégié
L’entretien professionnel constitue donc un moment annuel privilégié dans la carrière de chaque médecin. Ce rendez vous avec la hiérarchie est un droit pour chaque médecin et permet de faire le point sur l’expertise rendue, les particularités de l’exercice médical sur un secteur, lequel devrait être défini tel que l’entend la circulaire des missions des médecins de l’Éducation nationale de 2015. Cet entretien, dont il reste une trace écrite dans le dossier administratif de l’agent, doit valoriser les aptitudes, les formations, les missions particulières, les contextes difficiles de l’exercice, les partenariats mobilisés. C’est le moment aussi de faire préciser les évolutions de carrières attendues et les promotions à venir.
La transformation de la Fonction publique prévoit aussi de soustraire les mutations des opérations soumises aux organisations syndicales. Notre corps devrait, à priori, être peu touché par cette modification, si le système d’affectation des agents dans une académie et un département persiste à l’identique. À ce jour, il existe des barèmes de priorité qui permet d’assurer l’équité. Le nombre hélas important de postes vacants offre une grande possibilité d’accueil dans de nombreux départements. Contrairement à d’autres corps, les demandes de mutations sont peu nombreuses, et rarement insatisfaites. Il importe cependant d’obtenir pour cela la transparence de ces postes vacants pour accueillir une demande de mutation.
En revanche, la question se pose de la persistance de la priorité d’une demande de mutation d’un titulaire sur un poste vacant face au recrutement possible d’un contractuel, puisque la loi de transformation de la fonction publique ouvre plus officiellement la possibilité d’emploi de contractuels sur des postes de titulaires.
Le décret d’application sur le recrutement de contractuels sur emplois permanents permet, dans sa rédaction actuelle, la mise en concurrence directe des titulaires et des contractuels sur un poste vacant.
Le SNAMSPEN et le Sgen-CFDT ont demandé à ce qu’il y ait d’abord une publication de poste pour un recrutement de fonctionnaire, puis une publication pour un recrutement de contractuel si le poste est demeuré vacant.
ouverture plus large à des agents non-titulaires : quels impacts sur la médecine scolaire ?
Quant à cette plus large ouverture des postes à des agents non titulaires, quels impacts sur la médecine scolaire ?
La médecine scolaire est touchée par une pénurie grandissante liée à la démographie des médecins titulaires proches pour une grande partie d’entre eux de la retraite, mais aussi par un défaut de recrutement de médecins contractuels qui pourraient combler ce déficit de titulaires, empêcher la dégradation de l’exercice médical et faire face aux missions de service public.
Le salaire de recrutement des contractuels en santé scolaire est si souvent indécent que la pénurie semble entretenue. Pourtant l’exercice médical salarié a le vent en poupe et si nos recteurs voulaient que soient assurées les missions des médecins de l’Éducation nationale, ils pourraient utiliser, pour recruter, les budgets qui leur sont versés par le ministère de l’Éducation nationale pour les postes des titulaires non pourvus.
Cette loi de transformation de la fonction publique ouvre donc la possibilité de renforcer les effectifs sur les territoires de la médecine scolaire afin que cette dernière assume avec équité sur tout le territoire les missions qui sont les siennes, complémentaires de celles des médecins qui suivent régulièrement les enfants et les adolescents.
nos revendications
Ainsi, à l’heure où les transformations de la fonction publique se mettent en place et que la loi de programmation des finances se discute :
– Le SNAMSPEN/Sgen-CFDT revendique l’embauche de médecins contractuels en nombre suffisant pour retrouver des secteurs définis permettant l’expertise médicale au service de tous les élèves : cela impose de proposer aux futurs médecins contractuels des salaires décents et attractifs (à l’échelon 9 de la deuxième classe ou au-delà) ;
– Le SNAMSPEN/Sgen-CFDT demande parallèlement une revalorisation de la grille indiciaire de tous les médecins de l’Éducation nationale actuellement titulaires, formés à l’EHESP. Les contractuels embauchés ne peuvent avoir un salaire supérieur à des titulaires évoluant en santé scolaire depuis de très nombreuses années ! C’est injuste, démotivant, et nie l’engagement des médecins qui ont fait le choix de s’engager pour le service public, avec des débuts de carrière indécents. L’Union Confédérale des Médecins Salariés de France, à laquelle est affilié le SNAMSPEN/Sgen-CFDT mais aussi le SNMPMI (syndicat de PMI), et d’autres syndicats représentant les inspecteurs de santé publique, les médecins du travail…, a revendiqué au cours de la discussion pour le projet de la loi de réorganisation du système de santé en janvier 2019 une revalorisation et une harmonisation des rémunérations avec un « cadre statutaire comparable à celui proposé pour les praticiens hospitaliers, concernant les médecins praticiens salariés non-hospitaliers exerçant, notamment, des missions du domaine de la santé publique et de la promotion de la santé, des soins préventifs et/ou curatifs, de missions d’inspection ou de contrôle, de la médecine sociale et de la protection sociale ».
– Le SNAMSPEN/Sgen-CFDT demande à ce que la revalorisation de l’IFSE concernant, entre autres, les médecins titulaires de l’éducation nationale, et actuellement discutée dans chaque académie, soit bien au plafond de ce qu’il est prévu, soit une augmentation de l’IFSE pouvant aller jusqu’à 4% et un CIA au minimum de 600 euros, tel le CIA versé les deux premières années de mise en place du RIFSEEP. Le régime indemnitaire doit être harmonisé sur tout le territoire et basé sur le plus haut taux pratiqué.
– Le SNAMSPEN/Sgen-CFDT demande que perdure une formation statutaire nationale pour être employé (avec ou sans concours, selon les orientations de la nouvelle loi) sur les postes de médecins titulaires de l’Éducation nationale afin d’assurer la qualité de l’expertise et du service rendu au nom de la médecine scolaire.
– Le SNAMSPEN/Sgen-CFDT demande à ce que titulaires et non titulaires aient un droit identique de mixité d’exercice contrôlée de manière identique par la commission de déontologie.
– Le SNAMSPEN/Sgen-CFDT demande à ce que soient clarifiées les missions des médecins de l’Éducation nationale au lendemain de la loi de l’école de la confiance afin de mobiliser au mieux et justement l’expertise de ces médecins formés plus particulièrement à la prévention des troubles des apprentissages et du comportement, à l’accueil des élèves à besoins éducatif particuliers et à la construction de l’école bien traitante, en assurant pour cela leur rôle de formateurs des personnels de l’Éducation nationale.
– Le SNAMSPEN/Sgen-CFDT demande enfin à ce que le médecin de l’Éducation nationale trouve sa place dans le système de santé et au sein de chaque territoire comme un maillon facilitant les diagnostics et l’accès au soin, et à la prise en compte des besoins au sein des établissements scolaires, au côté et en partenariat avec le médecin traitant de l’enfant, grâce à un dossier médical partagé. Pour cela les actes médicaux et d’expertise du médecin de l’Éducation nationale doivent pouvoir être parfaitement identifiés, reconnus et valorisés par le ministère de la santé et constituer des indicateurs de santé en faveur de la santé des enfants et adolescents.
– Le SNAMSPEN/Sgen-CFDT demande à ce que les missions de publication, contribution aux travaux des laboratoires de recherches (universitaires, INSERM, CNRS…) soient réellement accessibles aux médecins de l’Éducation nationale et intégrées dans leur temps de travail, au même titre que la formation personnelle.
– Le SNAMSPEN/Sgen-CFDT demande à ce que les conditions matérielles d’exercice des médecins de l’Éducation nationale soient respectueuses de l’exercice médical : locaux décents et adaptés, bureautique, informatique, frais de fonctionnement, matériel médical, secrétariat doivent être assurés. Le partage de locaux avec d’autres spécialités médicales et paramédicales au sein de maisons médicales de santé, de structures médico-sociales, de services hospitaliers peut aider à la lisibilité de l’exercice et à sa reconnaissance ainsi qu’à la construction indispensable des partenariats au sein des cités et territoires pour faire face aux besoins des populations et aux actes prioritaires de prévention.